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Groupement d’employeurs: une réponse à la pénurie de talents et aux aspirations nouvelles des travailleurs ?

Véritable success story en France et chez de nombreux voisins européens, le Groupement d’employeurs est possible en Belgique depuis l’an 2000, mais peine à s’imposer chez nous, et pourtant… Rencontre avec Frédéric Naedenoen, chercheur, maître de conférences en Gestion des ressources humaines et locomotive de l’ASBL CRGEW.

Se réunir pour engager ensemble tous types de travailleurs, à temps plein ou à temps partiel. Tel est l’objectif des groupements d’employeurs et du CRGEW (Groupements d’Employeurs Wallonie) dont la mission est de sensibiliser le tissu économique wallon aux opportunités offertes par ce dispositif .  « Ne passe-t-on pas à côté d’une belle opportunité pour les entreprises qui doivent faire face à une pénurie de main-d’œuvre ? N’est-ce pas là une alternative séduisante pour des travailleurs lassés de la monotonie de leur emploi, mais attachés à sa sacro-sainte sécurité, plus encore en ces temps de crise ? » Des questions que Frédéric Naedenoen souhaite poser dans le débat de l’avenir du travail.

Une sorte de win-win qui permet aux entreprises de bénéficier de ressources humaines difficilement accessibles et qui offre aux travailleurs un emploi diversifié dans un cadre sécurisant.

Comment ça marche ?

Deux entreprises ou plus ayant besoin d’un même profil à temps (très) partiel et de manière récurrente vont créer un Groupement d’Employeurs (GE) sous la forme juridique d’une ASBL. Leur but ? Employer le (ou les) profil(s) à pourvoir et le mettre à disposition des entreprises membres. Le GE sera l’employeur légal du travailleur, qui partagera son emploi du temps entre les différentes entreprises. « Une sorte de win-win qui permet aux entreprises de bénéficier de ressources humaines difficilement accessibles et qui offre aux travailleurs un emploi diversifié dans un cadre sécurisant. C’est ce qu’on appelle aujourd’hui la ‘flexicurité’ » souligne Frédéric Naedenoen.

Win pour les entreprises…

Prenons un exemple concret. Une charcuterie, une PME active dans le tourisme et une entreprise de travail adapté ont besoin d’un informaticien. Mais pour seulement 1 ou 2 jours par semaine. Pas toujours facile de trouver un talent à temps partiel. Plusieurs pistes s’offrent alors à elles : un freelance, un sous-traitant ou… « un talent issu d’un groupement d’employeurs. Solution idéale afin de se partager cette ressource de haut niveau qu’elles ne pourraient s’offrir seules » explique notre expert.

De l’intérim à durée indéterminée ?

« Différent de l’intérim par son long terme et plus sécurisant que le freelancing, le groupement d’employeurs offre une solution sûre et accessible aux entreprises » estime Frédéric Naedenoen. Selon lui, les entreprises qui utilisent ce dispositif constatent des échanges porteurs sur de nombreux autres aspects avec les entreprises membres du même GE. « Last but not least, l’employé partagé devient vecteur de transfert de bonnes pratiques entre elles. »

…et win pour les travailleurs !

De son côté, le prestataire engagé va pouvoir bénéficier du statut d’employé tout en étant stimulé par une variété de projets et d’environnements. « Une vraie richesse au quotidien » témoigne Jean-Victor, informaticien ‘partagé’ (et heureux de l’être). « Je bénéficie désormais d’une certaine liberté dans mon travail, d’autonomie et de la diversité de projets d’un indépendant, sans les aspects contraignants de la gestion administrative et de l’insécurité des missions. »

De plus, travailler pour plusieurs entreprises en même temps lui confère de multiples expériences simultanément. Une belle plus-value sur une carrière. Jean-Victor estime également gagner en efficacité et en proactivité : « Un problème rencontré dans une entreprise sera d’autant plus vite résolu s’il se présente ensuite dans une autre. Et une bonne pratique ou un projet intéressant mis en place dans une entreprise sera évidemment proposé aux autres. » De son côté, Frédéric Naedenoen observe moins d’absentéisme et de turn over parmi ces travailleurs, « signe de leur bien-être et avantage supplémentaire pour les entreprises. »

Mais alors, pourquoi ça ne prend pas ?

Si ce dispositif semble gagnant sur tous les plans, il peine à se développer en Belgique. Aujourd’hui, il concerne seulement 200 travailleurs en Wallonie et à Bruxelles pour une trentaine de GE. Frédéric Naedenoen le déplore et pointe deux éléments : « un manque de connaissance du dispositif et une législation trop rigide ». Entre autres, la loi plafonne à 50 le nombre de travailleurs partagés qu’un GE peut employer. « Or, il est plus intéressant d’agrandir un GE existant que d’en créer un nouveau. Cela lui permet de se professionnaliser et de se stabiliser. Deux facteurs d’avenir pour le dispositif. »

Actuellement, la balle est dans le camp du ministre fédéral de l’emploi, Pierre-Yves Dermagne. S’il semble attentif à la bonne évolution du dispositif – qui a les faveurs de la Commission européenne -, il attend l’avis du Conseil National du Travail sur l’assouplissement de la loi qui permet les GE. Affaire à suivre, donc…


Cadre légal

Autorisés en Belgique depuis la loi programme du 12/8/2000, les groupements d’employeurs visaient alors prioritairement les demandeurs d’emploi difficiles à placer et ne pouvaient signer que des CDI à temps plein. Ce cadre restrictif a freiné le développement du dispositif qui a, depuis, connu deux évolutions législatives en 2014 et 2017.

Le cadre légal actuel prévoit qu’un groupement d’employeurs doit obligatoirement :

  • avoir la forme juridique d’ASBL ou de GIE (Groupement d‘intérêt économique) ;
  • avoir un objet social unique : la mise à disposition de personnel ;
  • disposer d’un agrément donné par le Ministre de l’Emploi (qui déterminera la commission paritaire du groupement) ;
  • signer des contrats de travail de minimum 19 hrs/semaine ;
  • occuper 50 travailleurs maximum ;
  • informer systématiquement le SPF Emploi de toute nouvelle entrée au sein du groupement d’employeurs-membres relevant d’une commission paritaire non représentée parmi les fondateurs du groupement.

Votre entreprise a besoin de recruter un temps (très) partiel ?

En tant que travailleur, vous aspirez à plus d’autonomie et de variété en toute sécurité ?

Rendez-vous sur le site du CRGEW ou prenez contact avec Frédéric Naedenoen :  frnaedenoen@uliege.be

Continuez sur votre lancée :

Catherine Degryse
Mordue de langue française, Catherine aime écrire et jouer avec les mots. L’entreprenariat, l'épanouissement au et par le travail, les carrières atypiques sont autant de sujets qui la passionnent et qu’elle se plaît à décortiquer et raconter ! Catherine houdt van het geschreven woord. Ondernemerschap, voldoening halen uit je werk en atypische carrières zijn onderwerpen waar ze met veel passie over vertelt en schrijft. Voir tous les articles de #Catherine Degryse