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Koen De Leus : « Les turbulences vont suivre plus rapidement »

Koen De Leus, Chief Economist chez BNP Paribas Fortis, s’intéresse tout particulièrement à la numérisation et à ses effets sur notre économie. En ce qui concerne le marché du travail, il prévoit des périodes de turbulences et un besoin croissant d’apprentissage continu.

Que fait en somme un Chief Economist ? Research, PR and advice, nous dit Koen De Leus. « J’ai un rôle consultatif et, par exemple, je réponds aux questions de la direction. Mais pendant la moitié de mon temps, j’organise des présentations sur les tendances qui ont trait à l’économie. Il peut s’agir de prévisions macro-économiques, mais aussi de numérisation, d’impact du changement climatique sur les entreprises, etc. Chaque chef économiste suit quelque chose de bien particulier, et dans mon cas, c’est la numérisation et son impact sur l’économie, l’inégalité des revenus, le marché du travail, etc. Koen De Leus a d’ailleurs écrit un livre intitulé ‘L’économie des gagnants’ et c’est un thème récurrent dans ses articles de blog.

Alléger, ne pas s’accaparer

La numérisation aura un impact sur le marché du travail, le travail et l’emploi, poursuit Koen De Leus. Il n’adhère pas au spectre d’un monde où les robots et les ordinateurs auraient accaparé tous les jobs. Des jobs vont se créer et d’autres vont disparaître, comme toujours en pareille situation.

« La question est de savoir si de nouveaux emplois vont apparaître au même rythme que d’autres qui vont disparaître au profit des robots. Dans ce cas, il n’y aura pas de problème à long terme. Ici non plus, je ne suis pas pessimiste : nous voyons que des jobs ou des tâches sont partiellement repris, mais pas des fonctions entières. Un robot ou un algorithme peut nous faciliter la tâche, mais en règle générale, il ne va pas la reprendre entièrement. »

La prochaine révolution industrielle

Koen De Leus

Koen De Leus fait remarquer que la numérisation, comme toutes les autres révolutions industrielles, va s’accompagner de turbulences. Le fait est que les GAFA de ce monde (Google, Amazon, Facebook, Apple and C°) ont déjà intégré les robots, l’IA et la technologie dans leurs business models, et sont hyper productifs. 90 % des entreprises restantes n’ont en cela pas encore pris de mesures, et sont donc en comparaison devenues inefficaces.

« Lors de chaque révolution industrielle, on a dû à un certain moment négocier un virage, un moment où la diffusion des nouvelles technologies et des connaissances se passe à grande échelle », rappelle-t-il. Cela se produira à nouveau, prédit-il, avec la large percée de la numérisation. Quand ? Koen De Leus n’a pas de boule de cristal, « mais cela se passe bien souvent après un fort ralentissement de la croissance ou une récession.  Les entreprises sont d’abord réticentes à recruter à nouveau du personnel et font tous les efforts possibles pour intégrer la technologie acquise précédemment ».

Toujours de nouvelles compétences

Ce qui a un impact significatif sur la reprise. Les économistes parlent alors de ‘jobless recovery’, une reprise économique au cours de laquelle l’emploi n’augmente que légèrement, à l’inverse de la productivité. Si la reprise suit son cours, la création d’emplois reprendra. De par l’arrivée des nouvelles technologies, le marché du travail va requérir d’autres connaissances et compétences.

« Le développement et l’intégration de nouvelles technologies s’effectuent de plus en plus rapidement. Obtenir un diplôme qui va vous servir tout au long de votre carrière, avec de temps en temps un complément de formation, n’a plus de sens. Dans la société actuelle, où chaque jour débarque un tas de nouvelles choses, les trois quarts de votre job se renouvellent tous les cinq ans », nous dit-il. Cela implique des fournir des efforts en continu afin de rester impliquer, ce qui représente une responsabilité pour l’employeur, les autorités et l’individu.

Stabilité de l’emploi

Cela signifie-t-il aussi d’avoir plus de dynamique sur le marché du travail, avec des périodes plus courtes passées dans une entreprise ? Pour certaines fonctions spécialisées, les entreprises vont vraisemblablement (continuer à) faire appel à des consultants et des freelances, bien que le chef économiste de BNP Paribas Fortis avertisse que les entreprises doivent veiller à ne pas trop s’appuyer sur des externes en raison du risque opérationnel que cela peut représenter.

« Et quid de la prédiction que d’ici 2030 la première société du S&P 500 n’aura plus un seul collaborateur fixe, en dehors de la direction ? Personnellement je n’y crois pas. Je crois par contre que dans les grandes entreprises, les personnes ayant un emploi relativement stable assumeront une grande partie des fonctions, à condition qu’elles aient également la volonté de suivre des formations. »

Freelance journalist. Doet van horen, zien en schrijven over o.a. HR en de arbeidsmarkt. Voir tous les articles de Timothy Vermeir