De quelle façon la gig economy influe-t-elle sur notre système de sécurité sociale ?
Uber, Airbnb, TaskRabbit, … de plus en plus de plateformes collaboratives en ligne permettent d’effectuer, sur base de projet, de courtes missions, ou des ‘gigs’ comme disent les Américains. En quoi cela affecte-t-il notre système de sécurité sociale ? Ce système est-il encore viable dans sa forme actuelle ? Paul Schoukens, professeur de droit de la sécurité sociale à la KU Leuven, considère que non.
Les jeunes Deliveroo ne peuvent pas être laissés pour compte. Ce sont des gig workers. Avec ce que cela suppose comme bas salaires et exploitation. Mais le Gig world est tout sauf homogène et grandit chaque jour un peu plus. Après les travailleurs manuels et les travailleurs saisonniers, voilà que les freelances, les consultants en col blanc bien rémunérés et les travailleurs du savoir viennent rejoindre ce groupe. « Notre système de sécurité sociale doit donc évoluer dans le sens de cette tendance », affirme le professeur Paul Schoukens.
La sécurité sociale prend avant tout en considération le travail classique à temps plein.
Hors, la sécurité sociale est un sujet qui nous concerne tous. C’est ce qui est clairement ressorti au cours de la soirée de débat De toekomst van de freelance-economie (uniquement disponible en NL) que NextConomy a organisée en février 2018. Lorsque les participants ont appris que les freelances néerlandais ne payaient pratiquement pas de cotisations sociales (parce que cela n’est pas exigé), avec les conséquences qui en découlent, tous furent soulagés du côté belge de savoir que chez nous c’est une obligation.
Hors, la sécurité sociale est un sujet qui nous concerne tous. Quiconque travaille contribue pour ceux qui en ont besoin. Mais la sécurité sociale prend en considération le travail classique à temps plein. La question que pose le professeur Schoukens, et que les autorités doivent aussi se poser, est la suivante : quel impact ‘l’économie des petits boulots’ a-t-elle sur notre sécurité sociale ? En somme, qu’entend-on par travail quand il s’agit gig economy ?
Les systèmes de sécurité sociale doivent être en mesure de s’adapter aux nouvelles évolutions, et notamment à celles d’une économie de plateformes collaboratives en croissance et d’une fragmentation du travail à temps plein en sous-activités.
Sécurité sociale appliquée sur le revenu total
« Avec cette économie de plateformes en augmentation, la sécurité sociale actuelle ne tiendra pas », affirme le professeur Paul Schoukens. « Certaines petites activités peuvent générer beaucoup de revenus, et des activités pourtant importantes relativement moins. Ce qui compte en réalité, c’est que l’ensemble des revenus, quelles que soient les activités qui les ont produits, puisse être pris en compte », dit-il.
Cela ne devrait pas faire de différence pour le principe même de la sécurité sociale liée au travail de savoir si l’on est un travailleur, un fonctionnaire, un utilisateur de plateforme collaborative ou un freelance.
La sécurité sociale non liée au statut
« L’argument selon lequel de nombreux gig workers paieraient déjà des cotisations sociales via leur métier principal n’est plus d’application.
Quelle sera encore votre occupation principale si vous effectuez différentes petites missions », demande Paul Schoukens. Selon lui, le statut dont vous relevez ne devrait donc plus importer.
Je pense que l’économie des plateformes collaboratives est une invitation lancée aux décideurs politiques pour réexaminer la notion de revenu.
Sécurité sociale et politique
La montée en puissance des plateformes collaboratives offre aux autorités la possibilité d’adapter la sécurité sociale aux réalités. « L’économie des plateformes collaboratives est une invitation lancée aux décideurs politiques pour réexaminer la notion de revenu. Celle-ci doit être élargie par rapport aux seuls revenus issus du travail traditionnel. Je pense que la relation directe entre volume de travail et volume de revenus n’est plus de mise. Sans oublier que l’on peut générer des revenus en spéculant ou en percevant des intérêts d’un capital reçu en héritage. Pour toutes ces raisons, notre système de sécurité sociale doit être adapté », explique Paul Schoukens.
Vous pouvez télécharger l’entièreté de l’interview de Paul Schoukens.
C’est Marleen Deleu, rédactrice en chef de NextConomy, qui a interviewé le professeur Paul Schoukens pour connaître son avis sur l’influence de la ‘gig economy’ sur notre système de sécurité sociale. Téléchargez l’article Wat is wel of niet ‘werk’ in de Klusseneconomie (format PDF).
Pensez-vous que notre système de sécurité sociale doit s’adapter à l’économie des petits boulots, à la gig economy, et que chacun doit contribuer ? Ne manquez pas de nous faire part de vos réflexions.
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